25 septembre 2015

Dossier Migration

A nos frontières


Mesdames, Messieurs, Chers Amis,

Aylan. Il aura fallu son petit corps sans vie échoué sur une plage pour que l'Europe prenne enfin la mesure du drame qui se joue à ses frontières.

Les humains que nous sommes se sont enfin rendu compte de ce que peut signifier pour d'autres humains de devoir fuir la guerre et risquer l'exil pour trouver la sécurité et la paix.

Passée l'émotion, que restera-t-il ?

Ce n’est pas d’aujourd’hui que Syriens, Erythréens, Irakiens, Afghans, risquent le tout pour le tout sur la route de l’Exil. Dans le battage médiatique sans précédent autour de la migration de ces dernières semaines, deux fronts antagonistes affûtent leurs arguments, pour l’ouverture des frontières ou au contraire pour leur fermeture.

Par une sélection d'articles, la CPRSI souhaite apporter quelques éclairages et un peu de recul, pour aider à passer de l’émotion à la pensée et à l’action sensées. Reconnaissante des nombreux élans de solidarité qui se manifestent, et de concert avec les Conseils synodaux de nos Eglises, elle souhaite signaler les possibilités d'engagement en solidarité avec les réfugiés.

Vous trouverez donc dans ce petit dossier :

·         Le reflet des réflexions de la CPRSI sur la situation actuelle, mises en forme par
          André Jufer
·         Dans le même sens, une opinion de M. Guy Mettan, parue dans Le Courrier
·         Elle est accompagnée d'une chronique de Serge Lachat, fin cinéphile
·         Un article de Robin Stünzi, Doctorant au Centre des migrations de l’Unine,
          qui met en perspective les chiffres actuels de la migration...
          et interroge la notion d' « afflux ».

Pour les chrétiens que nous sommes, la Bible et la théologie offrent des éclairages incontournables sur cette actualité. Nous vous proposons :

·         le lien internet permettant d'écouter la chronique de la rabbin
          Delphine Horvilleur (Paris) : "Souviens-toi que tu as été un migrant"  


·         La « charte de la migration » rédigée par le réseau œcuménique
          KircheNordSüdUntenLinks (EgliseNordSudEnBasAGauche)
          et diffusée à la Pentecôte cette année.

Enfin, une liste de lieux d'engagements possibles en Suisse romande et les contacts utiles.

Espérant que ce petit dossier saura enrichir votre réflexion et vous encourager à la prière comme à l'action aux côtés de nos frères et sœurs en exil, nous vous adressons nos meilleures salutations.

Pour la CPRSI,

Diane Barraud, présidente
Lausanne, le 24 septembre 2015


                                                                                   


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Syriens, Afghans et Erythréens aux portes de la forteresse Europe 

Un éclairage de la CPRSI 


Les migrants qui soulèvent tout ce battage ne sont cette fois-ci pas ceux qui viennent de l’Afrique de l’Ouest, mais de la Corne de l’Afrique et du Moyen Orient. Ils fuient le régime totalitaire de l’Erythrée, la terreur semée par les talibans en Afghanistan, et les bombes qui ruinent la Syrie. 
En Erythrée, le dictateur Issayas Afeworki règne d’une main de fer sur son peuple depuis l’accession de l’Erythrée à l’indépendance en 1993. L’Afghanistan d’Hamid Karzai est à la merci des talibans. La Syrie est saignée par une guerre où s’affrontent les troupes fidèles au régime dictatorial de Bashar el Assad, celles des factions en révolte contre ce régime et celles de l’Etat islamique fanatisées par son projet de grand califat. 

Mais connaît-on les circonstances historiques qui ont conduit à ces situations délétères ? Hélas les médias n’en disent pas grand-chose. Journalistes et politiques en parlent comme si ces événements tombaient du ciel, sans autre explication. Il est frappant de constater qu’à l’ère où les communications disposent de moyens jamais égalés jusque-là, l’information s’en tient à l’immédiat et occulte les péripéties historiques qui ont préludé aux événements qu’elle relate. 

Ce n’est pas le lieu ici d’entrer dans les dédales d’une histoire dont nous n’avons qu’une connaissance balbutiante. Mais sans qu’il soit besoin d’être historien, une constatation s’impose : tous ces pays ont connu dans le courant du XXe siècle et connaissent jusqu’à aujourd’hui des interventions européennes et étasuniennes qui ont bouleversé leurs populations et créé des déséquilibres géostratégiques avec le remaniement des frontières, ainsi que culturels et religieux avec l’exploitation des rivalités ethniques. Pour comprendre pourquoi Erythréens, Afghans et Syriens fuient leur pays pour l’Europe occidentale, il faudrait dénouer le fil rouge qui va du colonialisme italien puis britannique en Ethiopie-Erythrée jusqu’à la présence étasunienne aujourd’hui dans la Corne de l’Afrique. Il faudrait dénouer le fil rouge qui va de l’occupation soviétique à la guerre d’Afghanistan menée par les USA et leurs alliés. Il faudrait dénouer le fil rouge qui va de l’occupation de la Syrie par les Français et les Britanniques, tour à tour alliés et concurrents, jusqu’aux manoeuvres étasuniennes dans l’actuel conflit syrien. 

Ces trois fils rouges sont le produit des colonialismes occidentaux. L’arrivée tragique des flots de réfugiés érythréens, afghans et syriens est aussi une conséquence des politiques coloniales au XXe siècle et néocolonialistes aujourd’hui des grandes puissances européennes et étasunienne. En d'autres termes, l'Europe est beaucoup plus liée qu'elle ne veut bien le dire à ces déplacements et mouvements de population. Il en découle une responsabilité certaine dans l'accueil de celles et ceux qui aujourd'hui ont dû prendre la route. 

Pour la CPRSI, 

André Jufer 

Lausanne, septembre 2015